Un jeu de cartes parodique met à prix la tête
de Bush pour crimes de guerre en Irak
Les Yesmen sont de retour et veulent faire
inculper 55 dirigeants américains !
Le 25 avril 2003, un communiqué de la Trade Regulation
Organization a annoncé la sortie d'un jeu de cartes
représentant les 55 personnalités politiques américaines recherchées
pour "crimes de guerre en Irak". Calqué sur le
modèle du fameux jeu
de cartes lancé par les autorités américaines pour capturer les
leaders de l'admninistration de Saddam Hussein, cette opération en
ligne est encore un coup des Yesmen, un collectif d'activistes
américains.
Colin Powell et George W. Bush, activement
recherchés dans le jeu de cartes des activistes américains
Yesmen (DR) |
George W. Bush,
Donald H. Rumsfeld, Dick Cheney, Colin Powell... les plus hauts
responsables américains figurent bien sûr dans le jeu de cartes des
Yesmen, mais ils sont cotoyés par d'autres leaders étrangers
pro-guerre comme Tony Blair, Ariel Sharon, Jose Aznar et Silvio
Berlusconi, et par des industriels.
L'as de coeur est ainsi figuré par David J. O'Reilly,
le PDG du groupe pétrolier ChevronTexaco. Louis V. Gerstner Jr,
directeur du géant militaro-industriel Carlyle Group, est valet de
coeur, le roi de coeur étant attribué au magnat de la presse Rupert
Murdoch, pour la "couverture du conflit la plus
partiale".
Pour une inculpation par la
Cour pénale internationale
Diffusé par email à plus de 10
000 destinataires, le communiqué concocté par les Yesmen demande
l'inculpation de toutes ces personnalités par la Cour
pénale internationale
Le jeu de cartes est téléchargeable sous forme
d'images pour l'affichage sur Internet ou au format pdf,
que l'internaute peut imprimer.
"J'ai eu l'idée il y a deux semaines, en
voyant le jeu de cartes inventé par le département américain de la
Défense pour la traque des Irakiens. Et je pense que je ne suis pas
le seul, explique Andy,
le leader des Yesmen, un expert des opérations de subversion
médiatique, rendu célèbre pour s'être
fait passer pour un interlocuteur de l'OMC à plusieurs reprises.
"Je trouvais dommage de n'avoir encore
rien fait contre la guerre, à part manifester", raconte cet
Américain, programmeur de profession, qui se rappelle avoir été
brièvement gardé à vue lors des manifestations pacifistes du 22 mars
à New York, où il réside.
"Les Etats-Unis ont transgressé la
convention de Genève à de nombreuses reprises et c'est
principalement pour cela qu'ils ne veulent pas faire partie de la
Cour pénale internationale, justifie Andy des Yesmen. Ils s'appliquent à torpiller cette institution et à
soustraire les citoyens américains de son champ d'action."
Pour les Yesmen, les victimes de l'action américaine
en Irak tombent dans trois catégories, à commencer par "les vies". Les auteurs rappelent à cette occasion
les 100 000 à 200 000 pertes civiles estimées lors de la première
guerre du Golfe et les nombreuses victimes dues aux munitions à
uranium appauvri, à l'origine de cancers et du "syndrome de la
guerre du Golfe". Enfin, ils soulignent l'absence de bilan chiffré
des pertes civiles et militaires lors du conflit de 2003.
Premier état criminel au
monde
Les Yesmen disent aussi défendre la culture, victime
des pillages dans les musées et bibliothèques "que
l'armée américaine n'a pas protégés". Ils considèrent, enfin,
que les "perspectives à long terme" du rayonnement
américain dans le monde pâtissent du fait que "les
Etats-Unis sont désormais considérés comme le premier état criminel
au monde".
L'opération "jeu de cartes" est typique du genre
d'actions menées par les Yesmen, spécialistes du détournement et de
la parodie à but militant : son communiqué de lancement a été
officiellement publié par la Trade Regulation Organization (TRO),
qui n'est autre que le nouveau nom inventé par les Yesmen pour leur
fausse OMC.
"Nous avions mené beaucoup d'actions
grâce à Gatt.org, notre faux-site de l'OMC, dont la dernière était
l'annonce en Australie, en mai 2002, de sa dissolution. Nous
annoncions dans la foulée sa renaissance sous le nom
TRO, une nouvelle organisation pour la défense des pauvres et
non des riches, régie par la déclaration universelle des droits de
l'Homme", rappelle Andy. Déguisé en interlocuteur de l'OMC, ce
dernier avait exposé la mue de son organisation à un parterre de
businessmen venus assister à une manifestation organisée par CPA, un
regroupement d'experts-comptables australiens.
Le collectif Yesmen ne compte que quelques membres,
mais fonctionne de façon décentralisée, s'attirant parfois des
collaborations ponctuelles. Le jeu de cartes est par exemple
téléchargeable sur plusieurs sites amis, dont l'Examineur, un webzine d'info
100 % parodique édité par le Français Frédéric
Royer, lui-même auteur d'un carré d'as des
dirigeants français
Sensibiliser l'opinion publique
américaine
Pour les Yesmen, l'opération jeu de cartes est
avant tout une action de sensibilisation de l'opinion
publique : "Nous ne comptons pas vraiment traîner
tous les leaders américains en justice, même si nous nous
renseignons de près sur les mécanismes de justice
internationale, explique Andy. Mais si notre jeu
peut contribuer à la discussion et aider à ce que les Américains
réalisent que certaines actions de leur pays relève du niveau du
crime de guerre, tant mieux."
Les Yesmen envisagent de sortir rapidement une version
papier de leur jeu de cartes, à 500 exemplaires, qui pourraient être
vendus en ligne pour rembourser les frais.
La version officielle du jeu de cartes lancé par le
département de la Défense, distribué en ligne par des dizaines de
sociétés, se serait déjà vendue
à un million d'exemplaires
Concernant le succès de l'opération, lancée il y a
trois jours, Andy attend de voir : "Peut-être que
les gens trouveront que ce n'est qu'une toute petite blague, mais vu
le contexte aux Etats-Unis en ce moment, on ne sait
jamais..."